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Le sertissage

Dernier volet du thème de la saison « La sous-traitance horlogère ».

Le sertissage fait partie intégrante de la montre haut de gamme. Un sous-traitant se démarque à la Vallée de Joux en faisant de ce savoir-faire sa spécialité: la société Val’Heure nous a reçus pour nous en dire un peu plus.

Depuis l’Antiquité

La fixation ou l’inclusion de pierres fines et d’émail aux bijoux date de l’antiquité, les Egyptiens furent les premiers et la cour du pharaon avide de bijoux fins nous a laissé un grand nombre de pièces ayant inspiré les bijoutiers du XIXe siècle. Cependant, on ne peut pas parler d’art joaillier, car les techniques sont toujours les mêmes et les pierres utilisées sont généralement des pierres fines, mais pas précieuses, mises en forme de cabochon (forme naturelle de la pierre ovalisée). C’est avec le développement des cours européennes, les découvertes majeures de l’Amérique et le commerce avec l’Asie, que les pierres précieuses arrivent dans les ateliers des orfèvres. En France, le XVIIe siècle voit la naissance de l’art joaillier: les orfèvres se voient confier des pierres précieuses taillées dont ils doivent sublimer l’éclat en les fixant sur des bijoux, tout en laissant passer la lumière. Ils développent alors différentes techniques pour accrocher mécaniquement ces pierres sans risque de les perdre.

Ere contemporaine

Jusqu’en 1985, les pierres précieuses étaient serties manuellement par les orfèvres et plus particulièrement les sertisseurs à la cheville. L’artisan posait les pierres avec une loupe d’horloger collée à l’oeil sur un établi de bijoutier. L’arrivée des binoculaires fut une première révolution pour les métiers de l’orfèvrerie. La seconde fut la naissance des machines à commande numérique, les CNC, avec la possibilité de faire mécaniquement ce que l’homme était le seul à pouvoir maîtriser.

Sertissage

En bijouterie, comme en horlogerie, le sertissage est une opération consistant à fixer une ou plusieurs pierres précieuses sur un bijou ou un cadran de montre. Pour fixer la pierre de façon durable sur son support métallique, le sertisseur ne peut ni coller (le risque qu’une pierre tombe étant trop grand), ni souder (les pierres résistant mal aux chocs thermiques). Le travail consiste alors à percer une assise ajustée à la pierre dans le support, poser la pierre dans l’assise, puis rabattre du métal sur la pierre. Pour ce faire, il existe plusieurs techniques dont les différences se verront sur le rendu final du bijou. Plusieurs techniques de sertissage différentes sont souvent utilisées sur un même bijou.

La technique du sertissage cloisonné existe depuis le début de l’âge du métal. Depuis la Renaissance, certaines pierres sont serties par des griffes soudées autour de la douille contenant la pierre. C’est vers 1750 que le métier de sertisseur s’est transformé: jusque là
les pierres étaient posées sur un fond métallique, mais dès lors, on creuse le fond de part en part pour mieux faire passer la lumière à travers la pierre et alléger la monture.

Val’Heure

La société installée en terre combière fait partie du groupe Proserto, créé en 1990 à Genève par M. Cohen, diamantaire. Les clients, nationaux et surtout internationaux, ont demandé la pose des pierres sur les pièces. M. Cohen s’associe alors avec Ramon Iso et ensemble ils créent Cercab à Genève, société de sertissage de diamants. En 1996, le sertissage se démocratise, n’étant plus exclusivement réservé aux graveurs, qui avaient cette dextérité de creuser la matière pour les pierres précieuses. Un bon sertisseur peut faire jusqu’à 80 pièces par jour. Puis la demande de sertir des pièces en acier se fait pressante, rendant la main de l’homme sur ces pièces quasi inutile. Les machines CNC se développant de plus en plus, le groupe délocalise l’activité à la Vallée de Joux en 1996, pour industrialiser le travail de mitraillage (préparation au sertissage) et c’est en 1998 que la société Val’Heure voit le jour, dû à la fusion des sociétés LAVALLEE et LG mécanique.

Initialement installée au VIC, c’est en 2019 que la société achète son bâtiment actuel aux Bioux. Aujourd’hui, ce sont une trentaine de sertisseurs qui y travaillent, pour une soixantaine
d’employés. «Nous sommes spécialisés dans l’horlogerie haut de gamme, explique Michel Salvi, directeur de Val’Heure, nous sommes un des trois grands groupes de sertissage en Suisse sur l’habillage et le cadran. Nous sommes au service du client, qui donne ses composants, ses diamants et nous on met le tout sur sa pièce. Nous avons 12 machines pour le mitraillage (découpe de la matière, forme les grains, détermine l’emplacement de la pierre) et nos sertisseurs posent les pierres et rabattent la matière. Chacun pose environ 600 pierres par jour, ce qui fait plus d’une pièce à la minute.» Chaque pièce est ensuite vérifiée par le contrôle qualité.

Avenir ?

«Je pense que l’industrialisation va prendre le pas, nous sommes très sollicités pour avoir le meilleur marché possible, confie Michel Salvi. Mais le sertissage à la machine n’est pas fiable,
elle n’est pas encore capable de bouler les grains. A terme peut-être, mais de grands groupes s’y sont cassé les dents, le travail n’est pas encore abouti. Chez Val’Heure nous privilégions l’acte manuel sur le sertissage, nous désirons garder l’humain.»